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Élections en Afrique du Sud : ce qu'il faut savoir

Dernière mise à jour : 21 juin

Un membre du personnel électoral marque le doigt d'une femme pour indiquer qu'elle a voté lors des élections générales

à Nkandla, KwaZulu-Natal. Photo Emilio Morenatti/AP.


Ce 29 mai, 27 millions d'électeurs sud-africains votaient pour décider de l'avenir du pays. Un scrutin très incertain pour l'ANC, trente ans après la fin du régime d'apartheid. Revue des effectifs et des enjeux.


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Trente ans après la fin du régime d'apartheid, les Sud-Africains votaient, ce 29 mai 2024, pour renouveler les assemblées nationale et régionales. Le scrutin décidera du nom du prochain Président. Cyril Ramaphosa, dont le slogan est « Allons plus loin ensemble », est candidat à sa propre succession, mais c'est loin d'être gagné : le parti de la libération, le Congrès National Africain (ANC) est en perte de vitesse, notamment chez les jeunes, et pour la première fois depuis 30 ans, le parti des héritiers de Nelson Mandela pourrait perdre la majorité. C'est en tout cas ce que prédisent les sondages. A 18 h, le taux de participation dépassait les 66 %.


Quelque 27 millions d'électeurs inscrits étaient appelés à se rendre aux urnes pour choisir 400 députés. Les bureaux de vote ferment leurs portes ce soir à 21h (même heure qu'en France), mais les résultats définitifs ne seront connus que dimanche.


Les principales critiques qui visent le parti au pouvoir concernent le manque de services publics, ainsi que le chômage qui touche un tiers de la population, et 45% des jeunes. Si la formation du président actuel passe sous la barre des 50%, les députés de l'ANC devront faire alliance avec l'opposition. Ce serait une première dans le pays au niveau national, mais une alliance avec qui ? L’Alliance Démocratique, le plus gros parti d'opposition, de tendance libérale dirigé par John Steenhuisen, ou alors les Combattants pour la liberté économique, un mouvement de gauche radicale, dont le leader Julius Malema est un ancien de la ligue des jeunes de l’ANC. Il faudra également surveiller le score obtenu par uMkhonto we Sizwe, le tout nouveau parti dirigé par l’ancien chef d’état Jacob Zuma, qui a été forcé de démissionner de son poste en raison des nombreux scandales qui l'entourent.


De gauche à droite : Cyril Ramaphosa, président sortant et président du Congrès national africain (ANC). Photo Phill Magakoe/AFP ;

Julius Malema, chef du parti d'opposition Economic Freedom Fighters. Photo Alet Pretorius/Reuters ;

l'ancien président sud-africain Jacob Zuma (Photo Rogan Ward/Reuters).


Les principaux candidats :


Cyril Ramaphosa brigue un deuxième mandat. Il a succédé à Jacob Zuma, poussé à la démission en 2019. Ancien syndicaliste, ayant fait fortune dans les affaires, Cyril Ramaphosa est souvent raillé pour son manque de charisme. Les derniers sondages créditent l’ANC de 40 à 45 % des suffrages.


L'Alliance démocratique (DA) est le premier parti d’opposition, dirigé par John Steenhuisen. L'Alliance démocratique mène une coalition d’une dizaine de partis qui a pour objectif de détrôner l’ANC. Mais le parti est encore largement perçu comme une organisation de la minorité blanche du pays et a du mal à élargir sa base. Le parti dénonce la corruption du parti au pouvoir, l’absence de développement économique et le chômage. Les derniers sondages créditent l'Alliance démocratique de 20 à 22 % des suffrages.


Les Combattants pour la liberté économique (EFF) : ce parti radical de gauche est dirigé par Julius Malema, qui l’a fondé en 2013, après avoir été exclu de l’ANC. Le parti prône des réformes radicales, notamment la redistribution des terres et la nationalisation de secteurs économiques clés pour lutter contre les inégalités. Souvent coiffé d’un béret rouge, Julius Malema se présente comme le défenseur des pauvres. Les sondages créditent l’EFF de 10 à 12 % des suffrages.


Le parti uMkhonto we Sizwe (MK) est un petit parti – qui prend son nom de la branche armée de l’ANC sous le régime d’apartheid – créé il y a tout juste quelques mois par l’ancien président Jacob Zuma, en rupture de ban avec le parti au pouvoir. Ce dernier, empêtré dans des affaires de corruption, ne sera finalement pas candidat. Il y a une dizaine de jours, la justice l’a déclaré inéligible en raison d’une condamnation pour outrage à la justice il y a trois ans. Cependant, la photo de Jacob Zuma reste sur les bulletins de vote, qui ont déjà été imprimés, précise la Commission électorale. Les sondages créditent le mouvement de 8 à 9 % des suffrages.


Il faut encore ajouter le Parti Inkatha de la liberté (Inkatha Freedom Party, abrégé IFP), parti fondé en 1975 par le prince Mangosuthu Buthelezi. L'Inkatha est né dans la province du Natal et s'est ensuite déployé dans trois autres provinces. Parti traditionaliste à dominante zouloue, prônant un séparatisme territorial, il est devenu lors des années 1980 un adversaire résolu de l'ANC.


Afrique du Sud : 30 ans après l'apartheid, qu'est-ce qui a changé ?


Il y a trois décennies, le 27 avril 1994, après des siècles de ségrégationnisme blanc, les Sud-Africains noirs ont voté pour la première fois lors d'élections générales. Cela a marqué la fin officielle du régime d'apartheid, confirmée quelques jours plus tard lorsque Nelson Mandela a prêté serment en tant que premier président noir du pays. D'importants progrès sociaux ont été réalisés au cours des décennies qui ont suivi la fin de l'apartheid, mais l'héritage du racisme et de la ségrégation est encore très visible.


Balinde Njolo, qui a voté à l'hôtel de ville de Durban, dans le KwaZulu-Natal, explique ce qu'elle pensait de cette élection :

"J'attends avant tout des jeunes qu'ils exercent leur droit de vote, afin que nous puissions choisir les personnes que nous pensons pouvoir être de grands dirigeants pour notre pays." En ce qui concerne les questions clés de l'élection, elle met l'accent sur l'emploi et l'éducation :

"La première chose est le chômage, le fait qu'il y ait des gens qui sont allés à l'école et qui ont obtenu leurs diplômes,

mais qui ne peuvent pas trouver de travail.". Photo Al Jazeera


Comment fonctionne le système électoral ?


Le scrutin se déroule selon un système proportionnel dans lequel les partis et les candidats se disputent 400 sièges à l'Assemblée nationale. Les partis inscrits sur le bulletin de vote national se disputent 200 de ces sièges, tandis que les 200 autres sont répartis entre les neuf régions et disputés par des partis et des candidats indépendants. Dans les législatures provinciales, le nombre de sièges est déterminé en fonction de la taille de la population dans chacune des neuf provinces.


Pour la première fois, les électeurs recevront trois bulletins de vote au lieu de deux. Sur chaque bulletin, ils devront choisir un parti ou un candidat. Deux bulletins serviront à élire l'Assemblée nationale et le troisième servira à élire les membres du corps législatif de chaque province.


Un agent électoral prépare les bulletins de vote pour les élections générales à Soweto. Photo Jerome Delay/AP.


Comment les électeurs votent-ils ?


Tous les électeurs reçoivent trois bulletins de vote papier dans leur bureau de vote :


Bulletin national (bulletin bleu)

    Le même bulletin dans tout le pays

    Les électeurs élisent l'un des 52 partis politiques.

    Le scrutin déterminera les 200 sièges de l'Assemblée nationale.


Assemblée nationale régionale (bulletin orange)

    Le bulletin de vote est propre à chaque province

    Les électeurs élisent un parti politique ou un candidat indépendant.

    Le scrutin détermine les 200 sièges restants à l'Assemblée nationale.


Assemblée législative provinciale (bulletin rose)

    Le bulletin de vote est propre à chaque province

    Les électeurs choisissent des partis politiques et des candidats indépendants

    Le nombre de sièges est déterminé par la taille de la population de chaque province.


Pour la première fois, les candidats indépendants ont été autorisés à briguer des sièges à l'Assemblée nationale et dans les assemblées législatives provinciales. La Commission électorale indépendante a autorisé 14.889 candidats qui briguent 887 sièges lors des élections. Ils ont été désignés par 70 partis politiques, à l'exception de 11 candidats indépendants.

Au total, 31 partis politiques participent aux élections nationales pour la première fois.


Photo DR


Comment le président est-il élu ?


Les Sud-Africains ne votent pas directement pour le président ; ils élisent les 400 membres de l'Assemblée nationale, qui choisit ensuite le président à la majorité simple (201 voix ou plus). Si l'ANC obtient plus de 50 % des voix, le président Cyril Ramaphosa sera très probablement réélu pour un second et dernier mandat de cinq ans.

Les électeurs font la queue pour voter à Soweto, en Afrique du Sud. Photo Jerome Delay/AP.


Quels sont les principaux enjeux des élections ?


L'emploi - Le taux de chômage s'élevait à 32,4 % en 2023, soit près de 10 points de plus qu'en 1994, lorsque l'ANC est arrivé au pouvoir. Les jeunes représentent plus de la moitié des chômeurs du pays, avec un taux de plus de 40 %.


Économie - L'économie sud-africaine a à peine progressé depuis plus de dix ans, avec une croissance économique moyenne de 0,8 % depuis 2012.


Coupures d'électricité - Connues des Sud-Africains sous le nom de "délestage", les coupures d'électricité programmées imposées par la compagnie nationale Eskom en raison de son incapacité à produire suffisamment d'électricité pour répondre à la demande sont le fléau des ménages et des entreprises.


Corruption - Une longue série de scandales de corruption impliquant des personnalités de l'ANC ou des personnes qui leur sont liées a donné l'impression à de nombreux Sud-Africains que la cupidité des personnes en place contribue à la mauvaise qualité des services pour tous les autres.


Criminalité - L'Afrique du Sud a l'un des taux de criminalité violente les plus élevés au monde. Le problème est encore plus grave dans les townships densément peuplés situés à la périphérie des villes, où vivent encore de nombreux Noirs issus de la classe ouvrière.


Immigration - Le dernier recensement, effectué en 2022, a révélé que 2,4 millions des 62 millions d'habitants de l'Afrique du Sud sont des immigrants, contre 835.000 en 1996, année de la promulgation de la constitution post-apartheid.



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