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Raiza Isabel Salazar : de haute lutte, le droit d'être trans

Dernière mise à jour : 21 juin



Raiza Isabel Salazar. Photo DR


Une première mondiale, un évènement historique : l’État colombien vient de lui demander officiellement pardon. Raiza Isabel Salazar a 60 ans, elle vit en Colombie, dans la région de Cali. C'est une femme transgenre. Persécutée, menacée de mort par des paramilitaires d'extrême-droite, elle a dû s'enfuir, partir de chez elle. Au lieu de la protéger, l’État colombien et ses administrations ont "négligé" ses plaintes. Elle n'a jamais abdiqué. Après plus de vingt ans de haute lutte, elle vient enfin d'obtenir cet "acte de pardon". Pour elle et pour l'ensemble des personnes transgenre et leur droit de vivre en paix.


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Comme disait, en France, le sénateur-maire communiste d'Aubervilliers Jack Ralite (1928-2017), "je ne me plains pas, je porte plainte". C'est exactement ce qu'a fait, en Colombie, Raiza Isabel Salazar. Aujourd'hui âgée de 60 ans, cette femme transgenre a été persécutée, menacée de mort par les groupes paramilitaires d'extrême-droite qui pullulaient et terrorisaient en Colombie, particulièrement dans la région du Valle del Cauca. Elle a dû fuir, quitter la propriété qu'elle venait d'acheter, et a ainsi rejoint la cohorte des plus de 7 millions de "personnes déplacées" (dont 21,2 % issus des communautés afro-colombiennes et 6,2 % issus de communautés autochtones) du fait du conflit armé.


C'était en 2001, pour Raiza. Depuis lors, soutenue par une ONG, la Fondation Santamaría, elle n'a cessé de se battre pour faire valoir son droit, surtout lorsque l’État et ses administrations ont "négligé" de lui offrir la protection qu'elle demandait. Raiza a survécu. En 2023, dans la seule région du Valle del Cauca, ont été dénombrés 143 transféminicides.


Des droits, ça existe quand même, même en Colombie. Pour la coupable négligence dont il fit preuve envers Raiza, l’État colombien, qui allait être condamné par la Commission interaméricaine des droits de l'homme, a préféré prendre les devants, et a organisé de son propre chef, un "acte de pardon", le 19 mars dernier à Cali : une première mondiale, un événement historique... que l'ensemble de la presse française n'a pas jugé digne d'intérêt.

J-M.A.


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Raiza Isabel Salazar, un portrait vidéo (en espagnol)



Quand la Colombie présente ses excuses à Raiza Isabela Salazar, une femme transgenre discriminée et ignorée par l'État...

(d'après un article de Camila Osorio pour El País)


Le 8 août 2022, une femme transgenre nommée Raiza Isabela Salazar, qui vit dans la petite ville de Dagua, dans l'ouest de la Colombie, a conclu un accord juridique avec l'Agence nationale de défense juridique de l'État et a obtenu une demande de pardon. "L'État colombien a reconnu de manière autonome sa responsabilité dans la violation des droits de Raiza à des garanties et à une protection judiciaires", indique une déclaration officielle. Raiza Salazar a survécu à la violence du conflit armé en Colombie et à la discrimination à l'encontre de la population LGBTI+, mais les institutions judiciaires n'ont pas enquêté sur les violences dont elle a été victime et n'ont pas cherché à la protéger. C'est pourquoi le gouvernement colombien lui demande aujourd'hui de lui pardonner.


"Le pardon est quelque chose qui vient de l'âme", déclare Raiza Isabela Salazar. "L'État nous a toujours tenus dans un mépris absolu", ajoute-t-elle, sans oublier d'autres groupes discriminés : les indigènes, les Afro-Colombiens, les homosexuels. "Un pardon général, un pardon à tout l'univers qui ne devrait pas être discriminé", conclut-elle.


"Beaucoup, comme Raiza, continuent de penser que l'État arrive en retard", a déclaré l'une de ses sœurs lors de la cérémonie de pardon, qui s'est déroulée le 19 mars 2024 au Centre culturel Casa de Mono à Cali. "Le fait que l'État soit ici aujourd'hui pour demander le pardon de Raiza est le résultat de notre lutte", a-t-elle ajouté.


L'affaire de Raiza Isabel Salazar a commencé lorsqu'elle a déménagé en 2001 à Dagua, où elle avait acheté une petite propriété. Mais là, "elle a été victime de menaces répétées de la part de voisins et a ensuite été attaquée à balles réelles". Des balles qui, selon le gouvernement, provenaient de groupes paramilitaires. Raiza a survécu mais, en 2005, elle a décidé de quitter Dagua pour sauver sa vie. Elle a alerté les autorités qu'elle avait été déplacée par la violence.


Pour tenter d'obtenir justice, elle est revenue en 2009. Elle a de nouveau été menacée, mais cette fois-ci, elle a décidé de signaler les violences dont elle était victime au bureau du procureur général. Elle a déclaré dans sa plainte "qu'au mois d'octobre 2009, elle a reçu des menaces et des insultes, que les auteurs ont jeté des déchets et des excréments de chevaux, ainsi que des pierres sur sa maison, et que les accusés sont entrés dans sa propriété en grimpant sur le toit, lui ordonnant de partir, en indiquant qu'ils allaient la tuer". La plainte a été transmise au bureau des contraventions de la police de Dagua, mais aucune suite n'a été donnée pendant des années. En 2012, Raiza Isabel Salazar a porté son affaire devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme. Et, avant une condamnation, l'État colombien a décidé de conclure un accord avec elle.


"Dans le cas précis de Raiza Isabela Salazar, l'État avait l'obligation d'enquêter, de poursuivre et de punir les responsables", déclare Jhon Camargo, directeur chargé de l'Agence nationale de défense juridique. C'est la première fois dans le système interaméricain des droits de l'homme qu'un gouvernement demande pardon à une femme transgenre sans y être contraint par une condamnation.


Cette demande de pardon intervient le jour même où l'État colombien a été condamné pour la persécution de l'ONG Colectivo de Abogados José Alvear Restrepo, une organisation non-gouvernementale à but non lucratif qui défend les droits humains en Colombie.


PHOTO-REPORTAGE : LE 19 MARS 2024, ACTE DE PARDON

(source : ministère colombien de la Culture)








VIDÉO (en espagnol)

La Fondation Santamaría, une histoire de résistance. Vidéo publiée il y a 20 ans, à l'occasion du 15ème anniversaire de la Fondation.





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