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Photo du rédacteurJean-Marc Adolphe

Mayotte, le désastre prévisible

Dernière mise à jour : il y a 3 jours


Photo Mayotte hebdo


Reportage et analyse. Déjà 15 morts et sans doute beaucoup plus, par centaines. Le cyclone Chido laisse, à Mayotte, un paysage d'intense désolation. Une élue Rassemblement national a vite désigné les responsables d'un tel désastre : les migrants, toujours les migrants. En 2022, des scientifiques alertaient pourtant sur l'aggravation à venir des catastrophes dites "naturelles" en raison du réchauffement climatique. Plutôt que de contrarier son "inaction climatique", Emmanuel Macron a préféré dégainer à Mayotte l'option répressive, avec Gérald Darmanin en shérif de "l'opération Wuambushu"...


Prénom d'origine nigériane, Chido signifie "Amour de Dieu". C'est devenu le nom d'un cyclone tropical, pas vraiment miséricordieux. Après avoir touché l'archipel d'Agaléga de Maurice le 11 décembre, puis avoir balayé le nord de Madagascar, et avant de poursuivre sa route vers le Mozambique et le Malawi, Chido, troisième cyclone de la saison 2024-2025 dans l'océan Indien sud-ouest, a frappé de plein fouet Mayotte, le 14 décembre.


Avec des vents de plus de 225 km/h, Chido laisse derrière lui un état de désolation sur une bonne partie du territoire insulaire. Le bilan humain s'annonce terrible. S'il était fait état, hier soir, de quatorze morts et 250 blessés, le préfet de Mayotte François-Xavier Bieuville s’est montré beaucoup plus pessimiste : «  Je pense qu’il y aura certainement plusieurs centaines, peut-être approcherons-nous le millier, voire quelques milliers » de morts au vu de la « violence » du cyclone, a-t-il déclaré à la télévision locale


Ci-dessous, vidéo en 3 séquences : des rafales de vent jusqu'à 200 kms / heure ; la maternité de l'hôpital de Mayotte inondée ; des secouristes qui tentent de se mettre à l'abri à Mtsamboro. Sources : réseaux sociaux, Mayotte la 1ère, Chad Youyou.



Après le passage du cyclone : un état de désolation



A Mayotte, après le passage du cyclone Chido. Photos Mayotte hebdo


Le pont de Maoudzou. Photos Dylan Djamel


A Mtsamboro, au nord de Mayotte. Source : page Facebook de Chad Youyou, chef d'entreprise et secouriste. A la suite, son témoignage en vidéo



Sans la moindre compassion pour les victimes, à laquelle sa religion (musulmane) aurait pu l'incliner, la députée Rassemblement national de Mayotte, Anchya Bamana, a vite trouvé, avec une vergogne sans limites, les responsables de ce désastre : ce sont les migrants illégaux, venus en majeure partie des Comores voisines (rappelons ici, comme nous l'avions fait en mai 2023, que Mayotte devrait être rattaché à l'archipel des Comores. Nous avions alors cité la vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme, Marie-Christine Vergiat, pour qui « la façon dont sont traités les Comoriens sans papiers est indigne d’un pays comme la France ». Lire ICI). Souvenons-nous de l'opération Wuambushu, lancée à grand renfort de policiers et de pelleteuses par Gérald Darmanin pour traquer les migrants et détruire leurs habitats. On ne sait toujours pas quel a été le coût total de cette opération Wuambushu, « symptôme d’un État "bricolé" à Mayotte » pour The Conversation. Autant de moyens strictement répressifs qui ne sont pas allés au développement humain de l'île.


Madame Anchya Bamana a raison : l'actuel désastre cyclonique de Mayotte était parfaitement prévisible, mais pas au sens qu'elle dit. Dans la pure ligne du Rassemblement national, on ne l'a jamais entendu dire quoi que ce soit sur le changement climatique. En avril 2022, après les tempêtes tropicales qui avaient frappé Madagascar, le Malawi et le Mozambique au début de l'année, une équipe internationale de 22 météorologues de l'ONG scientifique World Weather Attribution avait tiré la sonnette d'alarme en prévenant que les précipitations extrêmes en Afrique du Sud-Est allaient devenir beaucoup plus intenses et dommageables, notamment pendant les épisodes cycloniques. Quielles politiques préventives l'Etat français, sous les gouvernements successifs, a-t-il mis en oeuvre ?


Rappelons in fine que les associations Oxfam France, Notre Affaire à Tous et Greenpeace France poursuivent l'Etat français en justice pour « inaction climatique », et l'ont déjà fait condamner à deux reprises, sans que la compensation exigée ne soit suivie d'effets. La cour d'appel administrative de Paris a enjoint le Conseil d'Etat, ce vendredi 13 décembre, de réexaminer sur le fond le recours de ces associations réunies soous la bannière de "L'Affaire du siècle". Combien de cyclones dévastateurs et meurtriers faudra-t-il pour réveiller les consciencves ?


Jean-Marc Adolphe

 

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