Rassemblement de protestation de femmes indigènes.
En Colombie, pendant le conflit armé, les femmes indigènes ont été régulièrement victimes de violences sexuelles de la part de membres de la force publique. En juin 2020, 7 militaires avaient violé une jeune fille de 12 ans de la communauté Embera Katío. Malgré l’indignation suscitée par ce viol, il a fallu attendre plus d’un an pour que ses auteurs soient jugés et condamnés.
Enfin ! Il a fallu plus d’un an pour que justice soit faite. Le 22 juin 2020, sept militaires colombiens du bataillon San Mateo, censés protéger les populations, avaient séquestré et violé une jeune fille de 12 ans à Pueblo Rico, dans le département du Risaralda, au centre du pays. Cette jeune fille appartient à la communauté indigène Embera Katío, l’un des 30 peuples autochtones de Colombie déclarés en danger d’extinction par la Cour constitutionnelle. « Ce n'est pas seulement une agression contre notre fille et sa dignité en tant qu'être humain et membre d'un peuple ancestral, mais aussi une agression contre l'ensemble de notre peuple Embera Katio », avaient déclaré les représentants de cette communauté. Il a fallu toute leur détermination, avec celle de l’Organisation Nationale Indigène de Colombie (ONIC), pour que les auteurs de ce crime inqualifiable soient jugés. Des manifestations féministes avaient également eu lieu à Bogota.
Ce mardi 28 septembre, plus d’un an après les faits, la justice colombienne a prononcé en seconde instance une peine de 16 ans de prison contre six des militaires violeurs, le septième étant condamné pour complicité à 8 ans de prison.
Le cas qui vient d’être jugé n’est hélas pas isolé. Depuis 2016, l’armée colombienne a renvoyé 118 militaires impliqués dans des agressions sexuelles. En 2015, un rapport de l’Organisation Nationale Indigène de Colombie avait établi que la violence sexuelle était le type de violence le plus fréquent à l'encontre des femmes, et qu’environ 75% des victimes étaient des filles indigènes de moins de 14 ans. La majorité des dénonciations de violence sexuelle avant la signature des accords de paix concernaient des membres de la force publique (86% des cas), et dans 14% des cas, des groupes paramilitaires.
Et le peuple Embera n’est pas au bout de ses peines. Ce 30 septembre, 977 personnes de cette communauté ont été victimes d’un nouveau déplacement forcé, sous la menace de groupes paramilitaires, dans le département d’Antioquia. Depuis le début de l’année, 18 d’entre eux ont été victimes de mines antipersonnel, dans ce même département d’Antioquia. Et l’un des leaders indigènes de la communauté Embera Eyabida, Efrén Antonio Bailarín Carupa, a été assassiné le 16 septembre dernier dans le département du Chocó. Les juristes de l’association Akubadaura (qui s’est constituée en 2012 pour aider les peuples indigènes) ont une fois de plus demandé au gouvernement colombien de protéger les communautés indigènes, et tout particulièrement leurs leaders sociaux : « L'État doit agir pour fournir des garanties humanitaires et territoriales afin que les groupes armés quittent les territoires indigènes. »
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