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Photo du rédacteurJean-Marc Adolphe

Herbes sèches et autres fétus de paille (journal de bords, 24/05/2023)



A la volée : Hommage à Carène, l'infirmière poignardée à mort, Nominoë et la bataille de Blain, les secrets du voyage d'Emmanuel Macron en Mongolie, Leonardo de Caprio et les peuples autochtones, une troupe française invitée à New York au Dance Africa Festival, etc. Et pendant ce temps, une chienne colombienne déboule au festival de Cannes !


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HOMMAGE A CARÈNE

Les humanités s’associent à la douleur de la famille et des proches de Carène Thibaut-Mezino, l’infirmière poignardée à mort à l’hôpital Maison-Blanche, à Reims. Aux dires de l’une de ses collègues du CHU, Carène était « une vraie boule d’énergie et de douceur ».

Dimanche dernier, Carène avait participé à la brocante organisée à Ville-en-Tardenois. « Elle est venue en aide à une personne victime d’une allergie, elle lui a prodigué les premiers soins en attendant l’arrivée des pompiers. Elle était comme ça, Carène, une fille au grand cœur, toujours prête à aider, à aller au-devant des gens pour rendre service », racontent les deux employées de la supérette du village, qui avaient partagé un repas avec elle le midi.


En juin 2017, l’agresseur de Carène, Franck F., avait déjà, armé d’un couteau, blessé quatre personnes – dont une infirmière – dans un foyer médico-social proche de Vitry-le-François où il résidait. Il était convoqué vendredi prochain à une audition judiciaire qui devait débattre de son irresponsabilité pénale.

Selon un rapport de l’Observatoire de la sécurité des médecins publié hier ; en 2022, 1.244 incidents ont été déclarés par des médecins, un nombre jamais atteint ces vingt dernières années. Les violences envers les médecins ont augmenté de près d’un quart en 2022 par rapport à 2021 (23 %).

Cédric Renard, délégué FO au CHU Maison-Blanche, confie : « On ressent l’agressivité au jour le jour, depuis des années, au point que les soignants sont résignés. C’est devenu monnaie courante, non seulement aux urgences et au centre 15, mais dans tous les services. Ce qu’il s’est passé lundi peut hélas se reproduire à tout moment. »

Hier, une minute de silence a été observée dans la cour d’honneur de l’hôpital Maison-Blanche à Reims,

en hommage à Carène Thibaut-Mezino, tuée la veille. Photo L'Union.


Le ministre de la Santé, François Braun, a appelé à ce qu’une minute de silence soit respectée ce mercredi dans tous les hôpitaux de France, en mémoire de Carène. Le même ministre de la Santé a promis une réunion d’ici la fin de semaine pour « agir le plus vite possible pour garantir encore plus de sécurité pour les soignants ». La sécurité, toujours la sécurité.


« Ce serait un début », éditorialise dans le quotidien L’Union Grégoire Amir-Tahmasseb. « Mais cette profession que l’on a applaudie tous les soirs pour son courage et sa disponibilité pendant la crise du Covid a besoin de beaucoup plus. Il est temps de se pencher réellement sur la situation des personnels de santé, sur leurs conditions de travail. L’heure des éléments de langage sortis à chaque drame est terminée. »


Terminée ? Pas si sûr. Force ouvrière dénonce « la situation catastrophique de la prise en charge des malades mentaux » dans les établissements psychiatriques. Hier matin, 250 soignants, venus de tous les Pays de la Loire, ont manifesté devant l'Agence régionale de santé, à Nantes, pour réclamer plus de lits et d'effectifs. Parmi les manifestant.e.s, Béatrice Péron-Soubra, psychiatre à l'hôpital Saint-Jacques, à Nantes : « Les outils de soin en psychiatrie, c'est quoi ? C'est du temps à consacrer à nos patients, c'est de la disponibilité, de l'écoute. C'est l'humain qui compte. » Et le Dr Emmanuelle Mégie, de l'hôpital de Blain, qui tenait une pancarte sur laquelle il était écrit : "Psy épuisée, patients en danger".


Comme l’écrivait le psychanalyste clinicien Harold Hauzy dans une tribune publiée par Le Monde le 11 mars dernier, « la psychiatrie en France est le parent pauvre du monde de la santé » : « Dans une société où l’image est reine, où le regard est roi, le sens de l’écoute est un organe atrophié. (…) Il y a urgence à mettre fin au cynisme qui consiste à ne mettre en valeur que ponctuellement des initiatives comme l’Adamant [film récent de Nicolas Philibert], tout en sacrifiant toujours un peu plus les crédits de l’accompagnement psychiatrique et psychothérapeutique sur l’autel de la rentabilité des lits. Une société se condamne à fabriquer du fou si elle fait le contraire de ce qu’elle dit. »


Hier, Emmanuel Macron s'est fendu d'un message de condoléance.

De crocodile, les larmes.

Par exemple, en ce moment même, à Mayotte, avec l'opération Wuambushu et les bons services de Bulldozer-von-Darmanin-Action-française, il est en train de fabriquer de nouveaux fous. Avant-hier, un employé BTP s’est effondré lors de l’opération de destruction du bidonville que lui-même habitait avec sa famille. Il a été transporté à l’hôpital dans un état grave. Victime d’un AVC, son pronostic vital est engagé. Il avait demandé à son employeur, réquisitionné par l’État français, des congés afin de ne pas assister à la destruction de son domicile. Cette demande lui avait été refusée. Ni le ministère de l'Intérieur ni la préfecture de Mayotte n'ont souhaité commenter ce "fait divers". Il n'est pas inenvisageable qu'au moment du thé, Emmanuel Macron ait pu déclarer : "Après tout, ça ne fera qu'un pauvre de moins".


Éphémérides

Si elle n’était décédée en 1986, l’actrice irlandaise Siobhán Nic Cionnaith (photo ci-contre), née le 24 mai 1923, aurait 100 ans aujourd’hui. Au cinéma, elle a notamment joué en 1965 aux côtés d’Omar Sharif, de Julie Christie et de Géraldine Chaplin dans Le Docteur Jivago, de David Lean, d’après le roman de Boris Pasternak. Pour donner un physique plus "russe" à Omar Sharif, les maquilleurs lui avaient étiré les yeux avec du sparadrap. Le producteur Carlo Ponti, qui avait acheté les droits du roman, voulait que sa femme, Sophia Loren, obtienne le rôle de Lara (la nièce de Jivago). David Lean a refusé en déclarant qu'elle était trop grande pour le rôle…


Carlo Ponti voulait initialement tourner en Union soviétique, mais le gouvernement s’y opposa. Le film fut presque entièrement tourné en Espagne, notamment à Canfranc et à Soria, mais aussi en Finlande et dans la province de l'Alberta au Canada. La réplique de Moscou d'environ 4 hectares a été construite en banlieue de Madrid. Elle comprenait une grande rue de 800 mètres avec un tramway et un viaduc, une réplique miniature du Kremlin et 60 magasins et maisons entourant une grande place. 4 000 jonquilles ont été importées des Pays-Bas et plantées à proximité de la montagne de Soria, où était situé le domaine de Jivago. Le tournage a pris plus de dix mois car D. Lean voulait évoquer les différentes saisons, dont le rude hiver russe. Mais l'Espagne connut un hiver très doux cette année-là, ce qui entraîna de sérieux retards. Il fallut fabriquer de la neige en plastique pendant l'été. Les acteurs devaient se refaire maquiller très souvent à cause de la transpiration… Et il fallut attendre 1994 pour que le film soit autorisé en Russie…


Le 24 mai 843, il y a exactement 1.180 ans, la bataille de Blain vit la victoire des troupes bretonnes de Nominoë sur les troupes franques du roi de Francie occidentale Charles II dit le chauve petit-fils de Charlemagne. Cette victoire bretonne, suivie d'autres, conduisit en 851 au traité d'Angers, par lequel les pays nantais et rennais devenaient possession de la Bretagne. La viguerie de Retz qui faisait jusqu'alors partie intégrante de l'Herbauges fût, elle aussi, intégrée à la Bretagne.


Nominoë (Nevenou en breton) est à l'origine de la naissance d'une Bretagne unifiée et indépendante, d'où le qualificatif de père de la Patrie (Tad ar Vro) que lui a attribué au XIXe siècle l'historien Arthur de La Borderie. Son nom, assez rare, est peut-être issu du vieux breton "nom" c'est-à-dire "temple", à rapprocher du gaélique irlandais "naomh" saint et gaulois "nemeto" (sanctuaire) ou "nemo" (ciel) avec comme variantes Nevenoe/Nevenou en breton, Naomhin, Nevin, Niven en irlandais.


Nominoë est mort subitement au cours d'une expédition dans la Beauce près de Vendôme, le 7 mars 851, après avoir une nouvelle fois occupé le Maine et l'Anjou. À Redon, une plaque apposée sur l'ancien rempart dit : « À la gloire de Nominoë, premier roi de Bretagne, fondateur de la ville de Redon avec saint Convoyon (…) en souvenir du XIe centenaire de la cité »


(Illustration : Noménoë, chef breton du IXe siècle, revient de la chasse, avec du sang encore sur les mains) et apprend que le fils du vieux chef du mont Aré a été cruellement tué par les envahisseurs francs. Il jure qu'il ne se lavera pas les mains tant qu'il n'aura pas chassé les Francs de Bretagne.)


Le 24 mai 1844, il y a exactement 179 ans, était envoyé, de Washington à Baltimore, le premier télégramme en morse. Le télégraphe avait été inventé sept ans auparavant par le scientifique (et peintre) Samuel F. B. Morse, qui a donné son nom au code permettant de transmettre un texte à l’aide de séries d’impulsions courtes et longues, qu’elles soient produites par des signes, une lumière, un son ou un geste.


(illustration : Télégraphe de Morse (1837), collection historique de France Télécom, Cité des télécommunications de Pleumeur-Bodou, France).


Les petits secrets de la visite d'Emmanuel Macron en Mongolie


Mine d'uranium gérée par Orano (ex-Oreva) au Niger.


On sait désormais quel était le véritable objectif de la brève escapade d'Emmanuel Macron en Mongolie, entre le sommet japonais du G7 et le retour à l'Élysée. Comme on pouvait s’en douter, ce n'était pas pour écouter les chants de gorge, dont il se bat les coucougnettes.

Officiellement, cette visite express faisait partie de "la stratégie de diversification des approvisionnements européens afin de garantir notre souveraineté énergétique". Plus concrètement (et plus trivialement) il s'agissait de donner un coup de pouce au groupe Orano (ex Areva) pour exploiter un gisement d’uranium situé dans le désert de Gobi. D'ores et déjà, Orano est l'investisseur français le plus important du pays. Mais l'attribution de la licence d'exploitation de ce gisement d'uranium est en cours…


Rappelons qu’Orano, qui s'est appelée Areva jusqu'en 2018, est une multinationale détenue par l'État français, née du regroupement en 2001 de trois entreprises du vaste programme nucléaire civil français et restée pendant deux décennies leader mondial. Ébranlée par plusieurs affaires politico-financières, ses effectifs ont chuté de 78 % en une décennie : 76.000 salariés en 2010 puis 42.000 en 2014 et seulement 19.000 en 2020. Le gouvernement l'a contraint à la vente en 2010 de sa très rentable Areva T&D, convoitée depuis 2006 par Alstom et Bouygues, puis en 2016 à un recentrage sur les combustibles nucléaires : l'extraction, enrichissement, transport, retraitement, gestion des déchets radioactifs.

La construction des réacteurs nucléaires, cœur de l'activité jusqu'en 2016, a été cédée à EDF, la propulsion nucléaire navale au ministère de la Défense, la mesure de la radioactivité à l'américain Mirion Technologies, l'éolien offshore à Siemens Gamesa et l'EPR d'Olkiluoto 3 à la holding Areva SA Areva a alors été renommée New Areva en 2016 puis Orano en 2018.


Il s’agit de se "libérer" de l’uranium russe et kazakh, parce qu’avec Poutine-qu’il-ne-faut-pas-humilier, ça devient quans même compliqué. Mais pas seulement : aujourd’hui, environ 30% de l'uranium extrait par Areva provient du Niger (où là aussi, ça devient compliqué, à cause des incursions conjointes des milices Wagner et islamistes). Mais à quel prix ? Lauréat du prix international Nuclear Free Future Award 2017 (dans la catégorie Résistance), Almoustapha Alhacen mène un combat depuis 2002 pour la reconnaissance des conséquences environnementales et sanitaires de l'exploitation des mines d’Arlit.

Fondateur et président de l’ONG Aghir In'man, il reproche aux filiales d’Areva, qui exploitent ces mines depuis les années 70 dans le nord du pays, un manque de transparence sur l’impact de leurs activités sur les populations locales. "Nous avons constaté un certain nombre de maladies à Arlit et dans les campagnes environnantes. Ces maladies, qui touchent les personnes mais aussi les animaux, sont inhabituelles dans cette zone", explique-t-il. "Quarante ans après le début de l’exploitation, Arlit ressemble à des ruines et il y a des millions de résidus exposés à l’air libre, à moins de 5 kilomètres de la ville à vol d’oiseau, dénonce Almoustapha Alhacen. Nous avons hérité de la pollution durable et cette pollution, malheureusement, elle est là." (Lire ICI)


Les contrats d’Areva en Mongolie ont commencé en octobre 2013, sous l’égide de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères. Un contrat là aussi contesté par les militants écologistes locaux, qui avaient déjà dénoncé la pollution radioactive occasionnée par les projets pilotes d’Areva dans le pays (A lire Areva s’installe en Mongolie, et fait peur aux populations du désert).

A gauche : Emmanuel Macron à son arrivée à Oulan-Bator, accueilli par le président de la République de Mongolie Ukhnaagiin Khürelsükh. A droite : à l'ouest du pays, localisation du gisement d'uranium de Zoovch Ovoo, dans le désert de Gobi.


Orano Mining est présent en Mongolie depuis plus de 25 ans. La société a conduit des opérations d’exploration minière avec la découverte et l’enregistrement d’importantes ressources en uranium. La filiale mongole d’Orano Mining a déjà obtenu trois licences minières d’exploitation. Aujourd’hui, Orano et son partenaire MonAtom, une société d’état mongole, collaborent en vue de développer un accord d’investissement sur le projet Zuuvch Ovoo, prévu pour durer plus de 30 ans (voir ICI).

En matière de prospection d’uranium, la Mongolie a une longue histoire. Les premières prospections furent menées juste après la seconde guerre mondiale, des équipes de géologues russes et mongoles ayant joint leurs efforts. Le pays a été « découpé » en quatre provinces uranifères : Mongol-Priargoun, Gobi-Tamsag, Hentei-Daur et Mongolie septentrionale. COGEMA (devenu AREVA Mines) a commencé à prospecter l’uranium en Mongolie en 1997, en ouvrant sa filiale mongole, la COGEGOBI. Après avoir évalué et conduit des recherches générales sur les différents gisements d’uranium, l’objectif s’est rapidement concentré sur la prospection de gisements de type enfermés dans des grès, dans les grands bassins distaux du Crétacé de la zone du Gobi oriental : la zone qui intéressée particulièrement Emmanuel Macron, VRP d’Areva.


Il s’agit de se "libérer" de l’uranium russe et kazakh, parce qu’avec Poutine-qu’il-ne-faut-pas-humilier, ça devient quans même compliqué. Mais pas seulement : aujourd’hui, environ 30% de l'uranium extrait par Areva provient du Niger (où là aussi, ça devient compliqué, à cause des incursions conjointes des milices Wagner et islamistes). Mais à quel prix ? Lauréat du prix international Nuclear Free Future Award 2017 (dans la catégorie Résistance), Almoustapha Alhacen mène un combat depuis 2002 pour la reconnaissance des conséquences environnementales et sanitaires de l'exploitation des mines d’Arlit.

Fondateur et président de l’ONG Aghir In'man, il reproche aux filiales d’Areva, qui exploitent ces mines depuis les années 70 dans le nord du pays, un manque de transparence sur l’impact de leurs activités sur les populations locales. "Nous avons constaté un certain nombre de maladies à Arlit et dans les campagnes environnantes. Ces maladies, qui touchent les personnes mais aussi les animaux, sont inhabituelles dans cette zone", explique-t-il. "Quarante ans après le début de l’exploitation, Arlit ressemble à des ruines et il y a des millions de résidus exposés à l’air libre, à moins de 5 kilomètres de la ville à vol d’oiseau, dénonce Almoustapha Alhacen. Nous avons hérité de la pollution durable et cette pollution, malheureusement, elle est là." (Lire ICI)


Les contrats d’Areva en Mongolie ont commencé en octobre 2013, sous l’égide de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères. Un contrat là aussi contesté par les militants écologistes locaux, qui avaient déjà dénoncé la pollution radioactive occasionnée par les projets pilotes d’Areva dans le pays (A lire Areva s’installe en Mongolie, et fait peur aux populations du désert).

En mars 2017, au micro de France info, Almoustapha Alhacen, fondateur et président de l’ONG Aghir In'man,

dénonçait l'impact des activités d'extraction de l'uranium au Niger.


En résumé : la "souveraineté" énergétique française, dépend (entre autres) de la Mongolie, où Emmanuel Macron est prêt à polluer / sacrifier le désert de Gobi. Qui s'en soucie ? Loin des yeux, loin du cœur...


La vie des grands fauves : Meta sur les cendres de Twitter

Twitter sent maintenant le rat (ellon-muské), ça donne de l’appétit à Meta (Facebook Instagram WhatsApp), qui prépare pour l’été une nouvelle application. Nom de code : P92 (ou encore Barcelona). C’est ce que vient de révéler Lia Haberman, qui enseigne le marketing social et d'influence à l'université de Californie à Los Angeles. Ce nouveau réseau social permettra d’accéder à différents flux de discussions et thématiques pour y poster votre avis en 500 caractères en y ajoutant photos, vidéos, liens, etc.

Bref, Meta s’apprête à inventer le fil à couper le beurre. Pour l’argent du beurre, ça reste à voir. La PME de Mark Zuckerberg vient d’être condamnée par l’Autorité de protection irlandaise de protection des données à une amende record de 1,2 milliard de dollars, pour transfert illégal de données.


Alors que le métavers bat de l’aile, Meta Zuckerberg n’est pas à un bouillon près. Dans le passé, ont déjà foiré : l'application anonyme pour adolescents tbh, l'application de type Cameo Super, le clone Nextdoor Neighborhoods, l'application pour couples Tuned, le réseau social pour étudiants Campus, le service de rencontres vidéo Sparked et bien d'autres encore.

Sinon, les humanités préparent un alter-réseau social, sans vol de données. Il faut juste 300.000 euros pour commencer, autant dire qu’on n’est pas sortis de l’auberge. Mais le nom est déjà trouvé, et la table est déjà dressée. Advienne que pourra…


Intelligence artificielle et festival de Cannes

Docteur en informatique à l’École polytechnique de Lausanne, le Turc Sami Arpa (photo ci-contre) aime le cinéma. Il a créé une entreprise (implantée à Los Angeles, Londres et Istanbul), Largo Films, qui a mis au point une intelligence artificielle, LargoAI, capable d’aider une boîte de production à concevoir de "meilleurs films" : en aidant à trouver les acteurs les plus pertinents pour un rôle, à en prédire le succès, ou encore à identifier quelles scènes modifier pour plaire au public visé.


Clip de présentation de Largo IA


A ce régime-là, le réalisateur (turc, lui aussi) Nuri Bilge Ceylan n’aurait jamais pu tourner Les Herbes Sèches, qui vient d’être présenté au festival de Cannes…

« Nous pouvons proposer de réécrire et de modifier les scénarios. Quitte à changer la fin de l’histoire », dit Sami Arpa.

« Et à signer celle du cinéma », commente Nicole Vulser dans Le Monde.


Sinon, comme le vante une réclame de BPI France (Banque publique d'investissement), "IA de la joie dans l'industrie". De la joie, vraiment ? Sans doute de quoi faire taire le tintamarre des casseroles et autres "objets sonores portatifs" ?

A venir prochainement, sur les humanités :

- Une enquête : "Ré-industrialiser ? le giga-bluff d'Emmanuel Macron".

- Un dossier : l'intelligence artificielle est-elle intelligente ?


Cinéma tout court...

"La Perra", de la cinéaste colombienne Carla Melo Glampert


Bonjour les stars ! Au festival de Cannes-sur-Hollywood, Leonardo DiCaprio pourrait logiquement empocher le prix d’interprétation mâle pour son rôle dans Killers of the Flower moon ("Les Tueurs de la Lune de fleur"), de Martin Scorsese, où il joue le rôle d'un combattant de la Première Guerre mondiale que son oncle (Robert De Niro, excusez du peu) pousse dans les bras d'une riche amérindienne, la belle et douce Mollie Kyle. Le film parle du génocide des indiens Osage dans les années 1920. Le rôle aurait pu être joué par un indien Osage, mais c'était un peu compliqué vu que les ancêtres de Leonardo DiCaprio, de Robert De Niro et Martin Scorsese ont décimé la plupart des Amérindiens qui vivaient là auparavant. On est sévère, mais Martin Scorsese est sans doute sincère : à la fin du film il apparaît en personne sous les traits d’un comédien de radio pour dire le scandale et la dissimulation de ce génocide.


Ce qui est certain, c’est que le Chilien Felipe Galvez Haberle ne remportera pas la Palme d’or. Son film Los Colones ("Les Colons") est présenté hors-compétition dans la catégorie "Un certain regard". Le film se déroule en 1901, à l'extrême sud du Chili, et revient sur le génocide des indiens Onas en Terre de feu, un territoire immense et fertile que l'aristocratie blanche occidentale de l'époque n’a cessé de vouloir "civiliser". D'après Olivier Delcroix, dans Le Monde : « avec Les Colons, fresque fascinante, violente et composite, le réalisateur chilien montre le prix de la construction d'une nation, qui n'est autre que celui du sang, de la violence et de la mystification. Il n'est pas interdit de ressentir une certaine mélancolie en sortant de la salle. » Juste de la mélancolie ? La mélancolie, c’est un concept occidental-blanc…


A Cannes, il y a quand même deux films latino-américains en compétition. Ils n'ont aucune chance : à part La Parole donnée (O Pagador de Promessas) du Brésilien Anselmo Duarte en 1962, aucun film latino-américain n'a jamais remporté la Palme d'or. Cela n'empêche pas les humanités de signaler-souligner Eureka, du cinéaste argentin Lisandro Alonso. Laisse tomber : non seulement c'est un film argentin, mais en plus c'est un film-fleuve (2 h 36). Nonobstant, c'est un film génial, qui se penche sur la condition indigène, non pas à l'échelle d'une tribu mais de façon transcendante à celle d'un continent bouleversé par l'histoire coloniale. Le dernier mouvement du film nous transporte au Brésil, au moment du choc pétrolier de 1973, auprès d'une tribu amazonienne qui lit son avenir dans les rêves. « Immense metteur en scène », écrit Mathieu Macheret dans Le Monde, « le cinéaste trace des trajectoires, s'attarde sur les visages, contrebalance la parole par de pénétrantes trouées de silences. Des scènes d'une intensité bouleversante surgissent comme cette jeune autochtone qui, désespérée, demande à son grand-père une potion pour faire le voyage vers l'autre monde. (…) Lisandro Alonso porte ici à son paroxysme la conception d'un cinéma chamane et passe-muraille où le monde débouche sur le rêve ou la réalité accède à son envers. »

Le second film latino-américain en compétition à Cannes est un film colombien, et là encore, c'est une grande première. Jamais un film colombien n'a encore été sélectionné en compétition à Cannes. Signé Carla Melo Glampert (photo ci-contre), La Perra ("La Chienne") concourt dans la catégorie "court-métrages". En plus, c'est un film d'animation : est-ce bien sérieux ?

Le cinéma d'animation, c'est comme les femmes: toujours à l'écart.


La Perra est le deuxième court métrage de Carla Melo Glampert, artiste visuelle issue de l’Université Javeriana à Bogota (son premier film, Por ahora te cuento, a été présenté au festival d’Annecy en 2019, à voir ICI). Image par image, à l’aquarelle, il lui a fallu trois ans pour le réaliser.


« Au début », dit-elle, « j’avais pensé à un autre titre, mais La Perra convenait parfaitement en raison de sa signification de "chienne" en tant que femme et en tant qu'animal. (…) Je voulais faire un film autobiographique, parce que je ne peux pas faire quelque chose que je ne connais pas. Mon intention n'était pas de faire un manifeste politique et féministe, mais en fin de compte, il est impossible d'éviter cela dans une société comme la Colombie, qui est catholique et conservatrice. En fin de compte, j'ai pris position et le court-métrage est féministe parce que ce sont des questions qui touchent les femme ».

L'intrigue se concentre sur la relation entre la fille et la mère, cette dernière trouvant dans la rue une chienne animale qui s'occupe de sa fille tandis qu'elle devient une chienne en se prostituant avec des hommes. « C'est aussi le regard d'une fille qui juge sa mère et quand elle grandit, c'est la mère qui juge la fille », explique Carla.


Si Carla Melo Glampert est la première cinéaste colombienne à se retrouver en compétition officielle à Cannes, elle est représentative d’un nouveau cinéma colombien fort intéressant, majoritairement incarné par des femmes : Clare Weiskopf, Laura Mora, Catalina Arroyave, ou encore Nina Marín. Plutôt que de débattre à n’en plus finir pour savoir si Johnny Depp a sa place à Cannes ou non, le festival de cinéma serait bien inspiré de leur accorder la place qu’elles méritent.


Sans oublier la danse (awasa)


Bientôt commencent les festivals d’été. L’un des premiers à ouvrir la ronde sera Montpellier Danse, à partir du 24 juin. Il en sera question lors d’un prochain journal de bords.


Hier, une troupe française s’est produite à New York, au cœur de Manhattan à Times Square (vidéo ci-dessous). Venues de la communauté rurale d’Apatou (9.500 habitants, blason ci-contre), à l’ouest de la Guyane et proche de la frontière avec le Suriname, une vingtaine de collégiennes (dans la section linguistique du collège Ma Aiye) se sont préparées pendant 5 mois pour participer au Dance Africa Festival accueilli par la Brooklyn Academy of Music. Leur but : faire connaître la danse awasa, emblématique de la culture Bushinengué (en français, littéralement : "nègres de brousse").


Bushinengué en Guyane, est le nom utilisé pour désigner l'ensemble des peuples descendants d'esclaves africains emmenés au Suriname pour travailler dans les plantations. Dès le XVIIe siècle, de nombreux esclaves prirent la fuite, aidés par l'immensité de la forêt amazonienne environnante, dans laquelle ils purent trouver refuge. Ces descendants d’esclaves ont créé des sociétés autonomes, situées à 50 km ou 200 km de l'océan, selon les sites, en marge du monde colonial, à l’intérieur des terres du Surinam, le long du fleuve Maroni et du Tapanahoni.

Pour danser l’awasa, il faut un pangui, tissu plein de couleurs qui se porte autour de la taille. Il faut encore une coiffure spéciale, le kaabachi : ce sont des tresses qui partent du centre du crâne pour aller vers l’extérieur, dans toutes les directions. Et enfin, aux chevilles, des kaawai, bracelets confectionnés avec des graines ou éventuellement des coquillages.


Accompagnée par des musiques traditionnelles (tambour et voix), la danse awasa est d’abord lente : les pieds sont à plat sur le sol et le frappent deux fois de suite chacun. Les graines se percutent et créent un rythme. Puis, les pieds changent de mouvement : ils ne sont plus collés au sol, mais sur la pointe, et font de petites rotations à droite et à gauche. Les graines de kaawai font alors des sons plus rapides, et on a l’impression que la musique est plus rapide alors que les tambours vont toujours au même rythme...


Jean-Marc Adolphe, Luciana Aguirre, Nadia Mével, Dominique Vernis

En tête d'article : Sevim (Ece Bagci), dans Les Herbes sèches, film de Nuri Bilge Ceylan.


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4 kommentarer


wilputte.brigitte
24. mai 2023

Les scandales des mines à ciel ouvert sont pléthores et malheureusement ne bénéficient pas des lois de protection des mines souterraines. De fait, on peut tout faire et surtout n'importe quoi! La première chose: nuire, à la population locale, à l'environnement, à l'équilibre économique d'un pays. La deuxième: mésestimer, les besoins réels (l'EPR de Flamandville n'est pas encore fini, et 16 vont être mis en construction....), l'énergie utilisée à l'extraction d'une quantité minime qui ne balancera pas l'excavation, l'ampleur des déchets et le futur miné que l'on va laisser à nos enfants...

Heureusement l'Art, nous permet d'envisager l'Humanité autrement et ici la danse que j'adore! Mais sans pour autant rester vigilante!

Lik

yvan.bogati
24. mai 2023

Sur Macron en Mogolie (ça fait un peu « Tintin au Congo », genre…) : super boulot qui mériterait d'être diffusé en article spécifique sur le sujet.

Lik
Jean-Marc Adolphe
Jean-Marc Adolphe
25. mai 2023
Svarer

Oui... On va suivre !

Lik

al-umhauer
24. mai 2023

Merci pour ce journal, qui informe , et vraiment, sur des sujets pas bateau et sensés.

Lik
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